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Dialogue entre Étienne et Lilian
Étienne Maquin à Lilian Brower Gomes
Je t'écris parce qu'à la suite de la publication de mon livre sur "Histoire et Politique", j'ai entrepris de "Repenser l'histoire de France" sous la forme d'étude des événements qui font partie de ce qu'on appelle le "roman national". Est-ce que cela pourrait intéresser ceux qui viennent à Bréau cette semaine-là d'entendre et de converser sur certains sujets comme :
le siège d'Alésia,
le baptême de Clovis,
le sacre de Charles VII à Reims par Jeanne d'Arc,
la grande Jacquerie
le massacre de la Saint Barthelémy
la Fronde
La grande peur de 1789
la commune de Paris (1871)
la grève générale de 1936
la défaite de juin 1940
Ce sont les sujets sur lesquels, justement, il y aurait beaucoup ,à redire, et sur lesquels il y a de nouvelles recherches récentes. Des sujets qui donnent à penser aussi sur ce qu'est devenue la France aujourd'hui. En quelques sortes, la continuation de mes réflexions ...
Je pourrais, si cela t'intéresse, consacrer une ou plusieurs séances d'une heure pendant la semaine sur certains de ces sujets au choix.
Et je propose d'introduire cela par la lecture et le commentaire que je peux faire du livre très suggestif de Mario Liverani, "la bible et l'invention de l'histoire", qui soutient que la bible est l'archétype du roman national.
Réponse de Lilian
Je viens de voir que tu n’est pas dans le groupe Whatsapp où il a été question de convivencia : ce qui est dans la droite ligne de vivre la diversité dans la prise en compte de l’autre. Or, dans ma compréhension des choses, les thèmes que tu évoques sont tous dans le déni de l’autre, dans une construction de la representation de la nation comme homogène.
Donc, de décortiquer ces éléments pourrait aller dans le sens d’expliquer la perte de « convivencia » ...et le succès de Zeymour.
Avec Fabienne et Muriel, on avait aussi envie de donner beaucoup la parole aux participants et faire le lien avec la vie de chacun.
Est que mon “appropriation” de ta proposition te parle ou je n’ai rien compris ?
Réponse d'Étienne
Eh bien justement, non. C'est le roman national qui est une représentation homogène à laquelle chacun est prié d'adhérer, de croire comme à un dogme. La liste des événements que je t'ai envoyée est celle de moments de l'histoire ou cette apparente homogénéité n'a pas existé. Des moments du passé pendant lesquels ce qui a eu lieu n'était pas homogène. "La construction de la représentation de la nation comme homogène" dont tu parles est de nos jours remise en cause, au point que pour chacun de ces événements passés il n'y a non pas une mais plusieurs représentations possibles. La "perte de convivencia" que tu évoques, c'est pour moi la difficulté actuelle que nous avons tous de comprendre d'où nous venons. Et cela n'a rien à voir avec les Zemmoureries ... ni avec les dizaines d'"histoires de France" qui pullulent en librairies ces derniers temps ! Comment reconstruire une "convivencia" autrement que par un roman, en faisant appel à l'intelligence de chacun plus qu'à leur croyance Et si tu es d'accord pour qu'on aborde ces sujets, lesquels te sembleraient les plus intéressants à tes yeux ?
Dialogue entre Étienne et Loís
De Loís Rousse à Étienne
Dans le cadre de la préparation de la semaine de Bréau, Lilian nous a informé de ta proposition de « repenser l’histoire de France ».
Cela me semble une bonne idée mais la liste de points, éléments clé du « roman national », que tu propose d'aborder correspondent de fait à un roman national du nord de la France, un roman national Franc en quelque sorte.
Mis à part le fait de parler de nation française dès 52 avant notre aire, ou sont passés les Volques Tectosages, les Ibères, et plus tard, le royaume wisigoth qui font pourtant partie de la constitution de la France d’aujourd'hui.
« Qu’en est-il de la Gaule « une, indivisible et éternelle » qu’on nous a inculquée à l’école, est-elle compatible avec l’Aquitaine, la Celtique et la Belgique décrites par César ? Que faisaient les Toulousains et les gens de la Narbonnaise pendant que l’Auvergnat Vercingétorix soulevait la Celtique contre Rome ? » comme le note Jórdi Labouysse (Écrivain,ancien professeur d’histoire).
Autre piste de débat : Jules César a écrit sur les Gaules devenues la Gaule dans les manuels scolaires hérités de Lavisse, de Michelet…
Réponse d'Étienne
En effet, je suis parti de l'histoire de France telle qu'elle est transmise à tous, au "nord" comme au "sud". Et c'est bien vrai qu'elle est
centralisée sur Paris (les Chtis pourront faire la même remarque que toi !!!). Mon propos est de reconsidérer ces événements à partir de ce que chacun en connaît et de les relativiser. On peut
ensuite discuter. Je soutiens pour ma part que, quel que soit le lieu d'un événement, le roman national n'est même pas "Franc", il est réduit à des personnages, des individus, des "héros". Par
exemple, les acteurs combattants de la Commune de Paris n'étaient majoritairement pas des parisiens de souche mais des ouvriers immigrants de partout en France et même de l'étranger (un de leurs
chefs était polonais).
Je ne propose pas, donc, une histoire du "sud", du "nord" ou de "l'ouest", je propose de reconsidérer les événements de notre histoire "commune". On pourra discuter à partir de là.
Enfin, on pourra discuter aussi de "nation" et de quand on peut en parler, certainement pas depuis les gaulois.
Parmi les thèmes que j'ai étudié, lesquels te semblent intéressants à aborder ?
Réponse de Loís
Mon intention n’est pas de regarder l’histoire « depuis chez moi » mais de prendre en compte
toute l’histoire.
Comme dit, depuis plus de 25 ans, notre troubadour toulousain Claude Sicre « pour enseigner l’histoire de France, il faut enseigner l’histoire
de l’occitanie aux picards ou aux wallons et l’histoire des picards et des wallons aux occitans… ».
Le roman national ne fait pas cela. Et il n’est pas impossible que cette présentation étriquée de notre histoire ait pu générer, par exemple, le
« racisme anti méridional » (voir l’article de Samuel Touron sur le blog des Rencontres de Bréau).
Parmi les points que tu propose au débat, celui qui me semble le plus pertinent, au regard de ce qui précède, est « la commune » mais en
l’abordant par un tour de France des villes ou elles ont eu lieu, avant ou après celle de Paris.
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